"Car rien ne se crée (…) il n'y a que des changements." Lavoisier 1789

Les Echos 3 janvier 2014

Les Echos 3 janvier 2014

07-01-2014

Le pétrole du Kurdistan irakien en passe d'être exporté

Par Veronique Le Billon | 03/01 | 06:00

Un avantage économique

Les conséquences géopolitiques d'une montée en puissance du Kurdistan irakien sont potentiellement importantes. « Les Kurdes sont en train de s'affranchir pour construire un Etat autonome qui jouera un rôle vis-à-vis des Syriens, des Turcs, des Iraniens et des Irakiens », estime Denis Florin, associé chez Lavoisier Conseil. Si cela peut représenter un risque pour la Turquie, ce dernier y voit aussi un avantage économique. « La stratégie de la Turquie est de devenir le hub énergétique de la région », poursuit Denis Florin. Le pays est, de fait, à l'intersection de plusieurs zones productrices, notamment en provenance de la mer Caspienne. Les compagnies pétrolières étrangères ont elles aussi fait le pari d'un accord entre Bagdad et Erbil. Total a pris l'été dernier 80 % dans un nouveau champ d'exploration pétrolifère (« Les Echos » du 21 juin 2013), après avoir acheté plusieurs autres parts de gisements. Chevron, ExxonMobil, Gazprom et une quarantaine d'autres ont aussi investi dans une région où les réserves de pétrole sont estimées à 45 milliards de barils.

Le pétrole du Kurdistan irakien en passe d'être exporté

Par Veronique Le Billon | 03/01 | 06:00

 

Etape par étape, la perspective d'une exportation de pétrole par le Kurdistan irakien se matérialise. Hier, le ministre turc de l'Energie a annoncé que l'oléoduc reliant la région semi-autonome du Kurdistan irakien et le terminal pétrolier de Ceyhan, au sud-est de la Turquie, était entré en service. « Le flux de brut entre l'Irak et Ceyhan a démarré et il est stocké dans des citernes », a indiqué Taner Yildiz lors d'une conférence de presse. Jusqu'à présent, seules des norias de camions livraient du pétrole en provenance du Kurdistan irakien vers la Turquie, avec des volumes modestes.

Soucieux de ne pas froisser Bagdad, le ministre de l'Energie a toutefois précisé que le pétrole stocké « ne sera pas exporté sans le consentement du gouvernement irakien ». Le gouvernement régional kurde (KRG) est en conflit ouvert avec Bagdad sur la question du partage de la manne pétrolière, le KRG ayant ouvert ses gisements (avec une production de 200.000 à 300.000 barils par jour) aux grandes compagnies étrangères contre l'avis du pouvoir central irakien. La prudence d'Ankara vis-à-vis des exportations est tactique. Fin novembre, le gouvernement régional kurde a conclu un accord d'exportation de pétrole et de gaz avec la Turquie, mais Ankara a publiquement exprimé sa volonté d'associer Bagdad. « Le compte à rebours a commencé pour Bagdad, note Francis Perrin, directeur de la revue « Le Pétrole et le Gaz arabes ». Si Bagdad refuse un accord, le gouvernement régional n'attendra pas indéfiniment. » Le ministre turc de l'Energie a indiqué hier espérer un accord en janvier, selon l'agence de presse Reuters.

Un avantage économique

Les conséquences géopolitiques d'une montée en puissance du Kurdistan irakien sont potentiellement importantes. « Les Kurdes sont en train de s'affranchir pour construire un Etat autonome qui jouera un rôle vis-à-vis des Syriens, des Turcs, des Iraniens et des Irakiens », estime Denis Florin, associé chez Lavoisier Conseil. Si cela peut représenter un risque pour la Turquie, ce dernier y voit aussi un avantage économique. « La stratégie de la Turquie est de devenir le hub énergétique de la région », poursuit Denis Florin. Le pays est, de fait, à l'intersection de plusieurs zones productrices, notamment en provenance de la mer Caspienne. Les compagnies pétrolières étrangères ont elles aussi fait le pari d'un accord entre Bagdad et Erbil. Total a pris l'été dernier 80 % dans un nouveau champ d'exploration pétrolifère (« Les Echos » du 21 juin 2013), après avoir acheté plusieurs autres parts de gisements. Chevron, ExxonMobil, Gazprom et une quarantaine d'autres ont aussi investi dans une région où les réserves de pétrole sont estimées à 45 milliards de barils